L’Autorité de la concurrence vient de rendre publique sa décision n° 21-D-04 adoptée le 24 février 2021 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de l’édition et de la vente de logiciels professionnels qui lui avaient été dénoncées.
Le secteur de l’édition logicielle comprend trois principales branches d’activité :
La saisine concernait deux segments au sein des gammes de logiciels dits « de conception assistée par ordinateur » (CAO) : le segment « bâtiment » et le segment « mécanique ».
Le groupe Autodesk & Autodesk France : Autodesk est une société d’édition de logiciels de création et de contenu numérique, fondée en 1982 aux Etats-Unis. Elle est l’un des plus grands éditeurs de CAO (18% du CA mondial). Autodesk France est implantée en France depuis 1989 et les entreprises constituent sa clientèle principale.
Cartocad (SARL): Cartocad (SARL créée en 1993) est une entreprise indépendante de services en informatique ; depuis sa création elle fait partie du réseau de distribution du groupe Autodesk.
Un contrat de revendeur à valeur ajoutée liait Autodesk et Cartocad. Le dernier contrat entre Cartocad et Autodesk a été signé le 25 février 2016 et devait expirer le 31 janvier 2019. Autodesk a notifié à Cartocad par courrier recommandé du 25 janvier 2019 « la fin des relations commerciales entre [les] deux sociétés après expiration d’un préavis de 18 mois, soit à compter du 1er août 2020 ».
Cartocad reprochait à Autodesk d’avoir abusé de sa situation de dépendance économique « lors de la mise en place de sa politique de restructuration de son modèle d’affaires ayant pour objectif de basculer vers la vente multicanale de licences de logiciels en ligne sous forme d’abonnements », en maintenant, dans le but de « s’en défaire », ses revendeurs dans une situation d’insécurité juridique et économique.
Cartocad estimait être en situation de dépendance économique au sein du réseau de distribution d’Autodesk et ne pas disposer de solution de remplacement étant donné que la vente des produits Autodesk et des services associés représentent plus de 90% de son chiffre d’affaires annuel.
Cartocad estimait qu’Autodesk se trouvait « dans une position dominante sur le marché des logiciels CFAO », en raison de la notoriété de ses produits.
Par ailleurs, l’obligation d’embaucher « parallèlement aux collaborateurs de la société, une équipe commerciale et technique dédiée uniquement à la promotion et la vente des produits Autodesk », conformément à l’article 9.4 du contrat, constituerait un obstacle juridique à la faculté de diversifier son approvisionnement auprès des éventuels concurrents de la société Autodesk.
L’Autorité a estimé que les faits dénoncés à l’encontre de la société Autodesk ne sont pas appuyés par des éléments suffisamment probants pour caractériser un abus de dépendance économique de la part d’Autodesk à l’encontre de Cartocad.
Pour mémoire, en vertu de l’article L. 420-2 du code de commerce, l’abus de dépendance économique suppose la réunion de trois conditions cumulatives :
Or, en l’espèce, les éléments fournis ne permettaient pas de caractériser un état de dépendance économique. L’Autorité a en conséquence estimé qu’il n’était pas nécessaire d’analyser le caractère abusif des comportements dénoncés.
Par Cynthia Picart et Najwa El Kandoussi
20/03/21