Cartel des câbles sous-marins : Présomption de responsabilité de la société-mère étendue

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La Cour de Justice de l’Union Européenne, saisie par la banque d’investissement américaine Goldman Sachs, société mère indirecte de Prysmian SpA et Prysmian Cavi e Sistemi Srl actives dans le secteur des câbles électriques sous-marins et souterrains ayant participé à un cartel des câbles électriques sous-marins, a, par arrêt du 27 janvier 2021, confirmé la responsabilité de Goldman Sachs dans l’affaire du cartel des câbles sous-marins et sa condamnation au paiement d’une amende à ce titre, à raison d’une extension de la présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante au cas où une société mère exerce l’ensemble des droits de vote associés aux actions de sa filiale (aff. C-595/18 P – Goldman Sachs v. Commission).

Contexte de l’affaire

Par son pourvoi, The Goldman Sachs Group demandait l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 12 juillet 2018, par lequel celui-ci a rejeté son recours, tendant à l’annulation de la décision de la Commission Européenne du 2 avril 2014 la rendant responsable de l’infraction à l’article 101 du TFUE commise par ses filiales sur une période allant du 29 juillet 2005 au 28 janvier 2009. La Commission a divisé cette période en une période précédant l’introduction en bourse des parts de Prysmian le 3 mai 2017 (OPI) et la période restante (post-OPI).

La Commission avait finalement infligé des amendes conjointes d’environ 37 millions d’euros.

Les moyens invoqués par la société requérante au titre de la présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante

La société requérante fait valoir que sa participation indirecte dans le capital de ses filiales se serait élevée, pendant la période antérieure à l’OPI, tout d’abord à environ 91,1%, puis à 84%. De plus, Il ressortirait de la jurisprudence de la Cour que la présomption d’exercice effectif d’une influence déterminante ne serait applicable qu’en cas de détention en totalité ou quasi-totalité du capital de la filiale.

Néanmoins, Goldman Sachs détenait 100% des droits de vote jusqu’à l’introduction en bourse de sa filiale, ce que la Commission a jugé comme équivalent à la situation dans laquelle une société détient 100% des actions.

L’arrêt rendu par la Cour de Justice de l’Union Européenne

Dans la présente affaire, la Cour rappelle que la Commission s’est appuyée sur une présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante en se fondant non pas sur le niveau de participation indirecte de Goldman Sachs dans le capital de ses filiales, mais sur le constat selon lequel la requérante contrôlait l’ensemble des droits de vote associés aux actions de ces dernières. Selon elle, c’est précisément le degré de contrôle de la société mère sur sa filiale qui est ici pertinent : grâce à la totalité ou quasi-totalité des actions mais également à la totalité ou quasi-totalité des droits de vote, la société mère peut être en mesure de déterminer le comportement de ses filiales sur le marché.

Elle rappelle à ce titre que le comportement d’une filiale peut être imputable à la société mère notamment lorsque cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché mais applique pour l’essentiel les instructions de la mère, eu égard notamment aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui les unissent.

Désormais la présomption simple d’exercice effectif d’une influence déterminante couvre également 100% des droits de vote détenus par une société mère : cette nouvelle présomption devrait non seulement englober la totalité, mais également la quasi-totalité des droits de vote. La Cour valide donc cette extension et rejette le pourvoi.

Prudence donc lors du rachat d’entreprise ou de prises de participation …

Par Cynthia Picart et Laurane Farrugia


29/01/21

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