La rupture brutale des relations commerciales établies à l’ère de la crise sanitaire

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Par un arrêt rendu le 26 mars 2021, la Cour d’appel de Paris a jugé que la crise sanitaire liée à la Covid-19 relève de la force majeure, justifiant une résiliation sans préavis dans le secteur de l’aviation.

 

Contexte

Le litige opposait la société ACNA (spécialisée dans le nettoyage des avions) à la société GSF Aéro, son sous-traitant. En l’espèce, la société ACNA avait confié à son sous-traitant le nettoyage et l’armement d’une partie des avions long-courriers de la société Air France, en transit à l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle.

Le 17 mars 2020, la société Servair, société mère de la société ACNA, a notifié à son sous-traitant la suspension du contrat de sous-traitance prenant effet au 23 mars et pour une durée indéterminée en raison de la chute du trafic aérien résultant de la pandémie de Covid-19, ayant entrainé un confinement serré.

 

L’argumentaire développé par le sous-traitant

Ayant été débouté, le sous-traitant a interjeté appel de l’ordonnance rendue par le juge des référés afin de demander la condamnation de son partenaire à reprendre la relation commerciale pour une durée de 24 mois. Selon elle, une relation commerciale établie depuis 15 ans ne saurait être rompue avec un préavis en-deçà d’une durée de 24 mois en application de l’article L.442-I II du Code de commerce. Un état de dépendance économique a également été avancé aux motifs qu’elle réaliserait avec la société ACNA, 100% de son chiffre d’affaires.

 

L’argumentaire développé par la société de nettoyage

Selon la société ACNA, le préavis accordé à son partenaire n’était autre que le préavis contractuel et, qu’en tout état de cause, elle serait légitime à mettre un terme avec effet immédiat au contrat compte tenu du cas de force majeur que constituait la Covid-19.

 

La décision de la Cour d’appel

Les juges du fond ont fait droit à l’argumentation soulevée par la société de nettoyage, et ont notamment relevé que :

 

  • La société ACNA a vu son activité chuter suite à la crise sanitaire. A ce titre, le secteur de l’aviation fut le plus sévèrement touché puisque la chute du trafic de passagers à Roissy-Charles-de-Gaulle s’est élevée à 66,8% en 2020. De plus, les vols long-courriers ont particulièrement été concernés. Selon les pièces produites au débat, le nombre de passagers sur les long-courriers a chuté de 84% par rapport au troisième trimestre 2019. Ces circonstances relèvent donc de la force majeure prévue à l’article précité.

 

  • Le contrat de sous-traitance contient une clause de force majeure faisant expressément référence aux “épidémies entraînant la suspension partielle ou totale de l’activité sur la plateforme aéroportuaire”. De telles dispositions contractuelles permettaient, selon les juges du fond, à la société ACNA de résilier le contrat en respectant un préavis de 3 mois. La résiliation du contrat est donc intervenue en application du contrat de sous-traitance, en respect du préavis et est imputable à la force majeure.

 

Par Cynthia Picart et Laurane Farrugia


15/06/21

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