C’est dans le cadre d’un avis rendu le 29 avril 2021 qui fait suite à une enquête sectorielle que l’Autorité de la concurrence a dressé le constat d’une arrivée massive de nouveaux acteurs dans le secteur des paiements, posant de nouvelles problématiques de concurrence.
Les changements réglementaires et les innovations technologiques récentes se sont traduites par l’arrivée de deux acteurs non-bancaires :
C’est l’arrivée de ces derniers dans le secteur des paiements (via de nouveaux services comme Apple Pay ou Google Pay) qui a été mise en lumière par l’Autorité : ces acteurs, contrôlant de véritables écosystèmes tout en ayant accès à un nombre massif de données, bénéficient d’avantages sans pour autant être soumis aux mêmes contraintes règlementaires que celles pesant sur les acteurs traditionnels. Les coûts marginaux plus faibles dégagés par ces acteurs renforceraient leur capacité à offrir gratuitement aux consommateurs leurs solutions de paiement.
Dans son avis, l’Autorité vise notamment l’apparition des services d’initiation de paiement, du paiement sans contact par carte bancaire mais également des cryptos-actifs et stable coins dans un secteur qui s’appuie de plus en plus sur des technologies de cloud computing et sur la technologie blockchain.
A ce titre, l’Autorité relève que ces technologies seront susceptibles de modifier substantiellement le fonctionnement du secteur des paiements.
D’une part, les services cloud se sont imposés comme des services essentiels et sont offerts par un oligopole d’acteurs de grande taille.
D’autre part, s’agissant de la technologie blockchain, il faudra distinguer selon l’usage pouvant en être fait dans la sécurisation des fonctions bancaires traditionnelles et son utilisation dans la réalisation de transactions en crypto-actifs/ jetons stables.
Parallèlement à l’arrivée de ces nouveaux acteurs, les acteurs bancaires ont dû développer de nouvelles stratégies pour rester en prise avec les segments innovants du marché notamment, outre les prises de contrôle par fusions-acquisitions, via des accords de coopération avec ces nouveaux acteurs tout en continuant d’investir dans la R&D.
Une des difficultés majeures tient au caractère biface de ce marché innovant et dynamique.
Le caractère mouvant du marché peut également rendre la délimitation du marché pertinent (servant de base à l’analyse concurrentielle) plus complexe notamment dans l’analyse des opérations de concentration.
De plus, le secteur bancaire est particulièrement visé par des barrières règlementaires et économiques strictes.
Voilà pourquoi les FinTech ne peuvent entrer sur le marché sans l’agrément de l’ACPR (Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution) dont l’avis dépendra de leur activité, de l’utilisation ou non de réseaux de distribution préexistants ou encore sur l’utilisation de nouvelles technologies.
Parmi les points de vigilance cités par l’Autorité de la concurrence, le renforcement du pouvoir de marchés des BigTech apparaît être le point de préoccupation le plus important par l’autorité de contrôle.
En effet, les données collectées massivement par les BigTech leur confèrent un avantage concurrentiel indéniable en ce qu’elles leur permettent de renforcer l’attractivité de leurs plateformes.
De plus, l’ouverture et la fermeture de l’accès effectif à l’antenne NFC (permettant les paiements sans contact) pourraient présenter des risques concurrentiels si elles conduisent, entre autres, au verrouillage des consommateurs dans un écosystème donné.
Outre les risques concurrentiels liés à l’utilisation de la blockchain, le bouleversement technologiques observable sur ce marché est également synonyme de remise en cause du modèle de la banque traditionnelle. A ce titre, il existe un risque pour les acteurs traditionnels de se voir cantonnés à des tâches impliquant des coûts fixes importants (comme les infrastructures de paiement ou les charges règlementaires) tout en étant marginalisés de la chaîne de répartition de la valeur.
L’émergence des Fintech et le nouvel écosystème qui en naîtra seront donc à suivre de près. A l’évidence, l’Autorité de la concurrence sera vigilante sur les opérations concernant ce nouveau secteur.
Par Cynthia Picart et Laurane Farrugia
30/04/21