Organisations professionnelles et entente : le cas des vins d’Alsace

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L’Autorité de la Concurrence s’intéresse, depuis plusieurs années, au rôle que peuvent jouer, du reste parfois de manière non intentionnelle, les associations professionnelles dans la conception et/ou commission de pratiques anticoncurrentielles.

A ce titre, sa pratique décisionnelle comporte de nombreux exemples de condamnations d’associations professionnelles pour des pratiques hétéroclites, puisqu’elles englobent les ententes sur les prix, la diffusion de consignes, les appels au boycott, les réponses concertées à un appel d’offres ou encore les refus de demandes d’adhésion.

Par sa décision 20-D-12 du 17 septembre 2020, l’Autorité de la concurrence illustre de nouveau sa pratique en sanctionnant deux organisations syndicales de viticulteurs ainsi que l’interprofession des vins d’Alsace pour entente.

Par une précédente décision  » Syndicat général des vignerons réunis des Côtes du Rhône » du 23 mai 2018, l’Autorité avait déjà sanctionne un syndicat professionnel du secteur viticol pour avoir élaboré et diffusé à ses membres des consignes tarifaires.

Ici, l’entente sanctionnée concerne également une concertation illicite portant sur le prix du raisin et des recommandations tarifaires à l’issue de chaque récolte ce pour chaque cépage alsacien à destination des viticulteurs et négociants.

L’interprofession publiait depuis 1980 des recommandations tarifaires  sur le vin en vrac à destination de ses adhérents et ce pour chaque récolte. Les prix étaient uniques par cépage et applicables à tous les exploitants alsaciens. Pour l’Autorité, ces recommandations s’apparentent à une consigne de prix et limite le libre jeu de la concurrence.

Pour l’Autorité, « en élaborant et diffusant des barèmes d eprix, un syndicat professionnel ou une organisation professionnelle, incite ses adhérents à se détourner d’une appréhension directe et individuelle de leur stratégie commerciale ou d’une détermination indépendante de leurs prix et fausse les négociations entre opérateurs ».

Les associations professionnelles et syndicats sont donc appelés à la plus grande vigilance dans la conduite de leurs missions afin de limiter les risques d’atteinte aux règles de la concurrence par commission ou facilitation, sous leur égide, de pratiques anticoncurrentielles.

A cet égard, l’on soulignera l’acuité de cette vigilance dans la mesure où la Directive ECN+, publiée en janvier 2019, en passe de transposition en droit français (transposition devant intervenir au plus tard le 4 février 2021), impacte les organismes et syndicats professionnels qui se livreraient à des pratiques anticoncurrentielles. En effet, jusqu’à aujourd’hui, le montant d’amende pour les associations professionnelles ne pouvait excéder 3 millions d’euros.

Dans le cadre de la directive, le plafond de l’amende encourue a été relevé à 10% de la somme des chiffres d’affaires des entreprises membres. 

A noter, l’Autorité va consacrer une étude à l’application du droit de la concurrence aux syndicats et organismes professionnels et aux potentielles infractions liées au sein de sa collection « Les Essentiels », à paraître.

Par Cynthia Picart


21/09/20

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