Outre-Mer : Nouvelles règles spécifiques en matière de droit de la concurrence issues de la loi DDADUE du 3 décembre 2020

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La loi DDADUE du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière vise à mettre en conformité le droit national au regard des exigences de l’Union européenne. Elle a été publiée au journal officiel le 4 décembre 2020.

Cette loi, extrêmement dense, transpose ou habilite à transposer 18 directives et met en conformité le droit national avec pas moins de 14 règlements de l’Union européenne dans diverses matières (concurrence,  consommation, finance, propriété intellectuelle, etc.). Elle poursuit l’objectif de renforcer le marché intérieur.

Elle est en vigueur depuis le 5 décembre 2020, étant précisé que certaines de ses dispositions sont en attente d’ordonnances de transposition pour prendre effet.

A l’analyse, plusieurs dispositions de la loi DDADUE intéressent l’Outre-mer et viennent modifier le Code de commerce, en matière de droit de la concurrence :

Sur les accords exclusifs d’importation (article L.420-2-1 du Code de commerce)

L’article L.420-2-1 du Code de commerce concerne la prohibition dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, des accords ou pratiques concertées ayant pour objet ou pour effet d’accorder des droits exclusifs d’importation à une entreprise ou à un groupe d’entreprises.

Il convient de rappeler que l’interdiction des accords exclusifs d’importation, a été introduite en 2012 avec la loi Lurel, l’objectif était d’augmenter la concurrence intra et intermarque entre grossistes-importateurs au sein d’un même DROM.

Un nouvel alinéa est introduit par l’article 37 III. 1° de la loi DDADUE, il vise à interdire d’appliquer à une entreprise, en absence de lien en capital avec elle, des conditions discriminatoires à des produits ou services pour lesquels il existe une situation d’exclusivité d’importation de fait.

Qui est concerné ? L’entreprise exerçant une activité de grossiste importateur ou de de commerce de détail ou un groupe d’entreprises dont au moins une des entités exerce une de ces activités.

Pourquoi ? Cette interdiction répond à la recommandation n°11 formulée par l’Autorité de la concurrence dans son avis 19-A-12 du 4 juillet 2019 : “l’Autorité recommande d’introduire dans le code de commerce une nouvelle disposition qui permettrait de sanctionner, dans les DROM, le fait pour un acteur intégré disposant d’une exclusivité de fait de discriminer ses clients tiers par rapport à ses conditions de ventes intragroupes”.

Sur les injonctions structurelles (article L.752-27 du Code de commerce)

L’article 37 III, 11° de la loi DDADUE allège le dispositif permettant à l’Autorité de la concurrence de prononcer des injonctions structurelles, dans certaines collectivités d’Outre-mer.

Pour mémoire, ce dispositif introduit par la loi Lurel permet à l’Autorité (par décision motivée prise après réception des observations et à l’issue d’une séance devant le collège) d’enjoindre de modifier, de compléter ou de résilier tous accords et tous actes par lesquels s’est constituée la puissance économique qui permet les prix ou les marges élevés constatés. Elle peut également lui enjoindre de procéder à la cession d’actifs, y compris de terrains, bâtis ou non, si cette cession constitue le seul moyen permettant de garantir une concurrence effective.

Ainsi, en cas d’existence d’une position dominante, détenue par une entreprise ou un groupe d’entreprises exerçant une activité de commerce de gros ou de détail, l’Autorité de la concurrence peut adresser un rapport motivé à l’entreprise ou au groupe d’entreprises en cause si elle constate que cette position dominante soulève des préoccupations de concurrence du fait de prix ou de marges élevés pratiqués par l’entreprise ou le groupe d’entreprises en comparaison des moyennes habituellement constatées dans le secteur concerné.

Quels changements ? Désormais, l’Autorité peut se fonder sur de simples “préoccupations de concurrence” et non plus d’une atteinte effective à la concurrence pour engager cette procédure. Le champ d’application est élargi car à présent les entreprises exerçant une activité de commerce de gros sont également concernées.

Pourquoi ? Cet allègement répond à la recommandation n°6 formulée par l’Autorité de la concurrence dans son avis 19-A-12 du 4 juillet 2019.

Par Cynthia Picart & Najwa El Kandoussi


25/01/21

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