Engagements pris par booking.com : bilan d’étape de l’autorité de la concurrence

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Pour rappel, l’Autorité de la concurrence a été saisie en 2013 et 2015 par les principaux syndicats hôteliers français et le groupe Accor de pratiques mises en œuvre par les principales plateformes de réservation hôtelière en ligne, dont Booking.com (groupe Priceline), dans le secteur de la réservation hôtelière en ligne. Selon eux, ces pratiques seraient constitutives d’entente et/ou d’abus de position dominante collective, en violation des articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce et 101 et 102 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

Ils estimaient en effet que les plateformes de réservation hôtelière visées dans leurs plaintes, dont Booking.com, imposeraient aux hôteliers :

“-  des clauses contractuelles dites « de parité », en vertu desquelles les plateformes exigeraient des hôteliers de bénéficier d’un tarif, d’un nombre de nuitées et de conditions d’offre (conditions de réservation, inclusion ou non du petit-déjeuner, etc.) au moins aussi avantageux que ceux proposés sur les plateformes concurrentes ainsi que sur l’ensemble des autres canaux de distribution (en ligne et hors ligne), parmi lesquels les canaux de distribution propres à l’hôtel (site Internet, téléphone, e-mail, au comptoir de l’hôtel, etc.).

–  des commissions (directes ou indirectes) prohibitives ;

–  des clauses contractuelles donnant le droit aux plateformes d’utiliser le nom de l’hôtel, ce qui leur permettrait ainsi d’améliorer leur référencement au détriment de celui des sites Internet de réservation des hôtels et de lancer des campagnes marketing sur Internet ;

–  des clauses contractuelles interdisant à l’hôtelier de contacter directement les clients obtenus via ces intermédiaires, ce qui permettrait aux plateformes de garder la mainmise sur les clients de l’hôtel ;

–  des clauses de suspension et/ou résiliation unilatérale ;

–  des clauses d’exonération de responsabilité.

Selon les organismes saisissants, ces clauses restreindraient en droit et en fait la capacité des hôteliers à fixer librement leurs prix et leur politique commerciale selon le canal de distribution considéré. Ces clauses constitueraient dès lors des restrictions verticales de concurrence, prohibées par les articles L. 420-1 du Code de commerce et 101 du TFUE.

Par ailleurs, l’identité de clauses entre plateformes, qui ne trouverait aucune explication rationnelle, révèlerait également l’existence d’une coordination tacite entre les agences de réservation en ligne, prohibée par les articles L. 420-1 du Code de commerce et 101 du TFUE.

En outre, l’imposition de ces clauses constituerait un abus par les agences de réservation en ligne de la position dominante collective qu’elles détiennent sur le marché de la réservation hôtelière en ligne, prohibé par les articles L. 420-2 du Code de commerce et 102 du TFUE.”

La plateforme s’est engagée à compter du 1er juillet 2015  à modifier la clause de parité tarifaire et à supprimer toute clause imposant des obligations de parité en termes de disponibilités de chambres ou de conditions commerciales non seulement à l’égard des plateformes concurrentes mais également des canaux directs hors ligne des hôtels et d’une partie de leurs canaux en ligne.

Ainsi, les hôtels pourront librement pratiquer des tarifs inférieurs et/ou des conditions commerciales meilleures sur des plateformes concurrentes de Booking.com et leur allouer des quotas de nuitées plus importants. Ils pourront également, notamment, proposer des tarifs inférieurs à ceux affichés sur le site de Booking.com sur leur canal de vente hors ligne (réservation sur place, par téléphone, fax, mails, messageries instantanées, points de vente physiques des agences de voyage, etc.), sous réserve que ces tarifs ne soient pas publiés sur le site internet de l’hôtel. Ils pourront aussi proposer des tarifs inférieurs à ceux affichés sur le site de Booking.com aux clients bénéficiant de programmes de fidélité.

Les hôtels pourront encore réserver à leur canal direct de vente (en ligne ou hors ligne) un nombre de nuitées supérieur au nombre de nuitées allouées à Booking.com.

Conclusions de l’Autorité sur ce premier bilan d’étape :

Selon l’Autorité de la concurrence,

“les éléments de bilan à sa disposition pourraient suggérer que les OTA (Online Travel Agency) se différencient à travers le prix des nuitées pratiqué sur leurs plateformes, mais que l’ampleur de cette différenciation, sa représentativité eu égard aux caractéristiques de l’échantillon retenu et son lien avec les engagements pris ou avec la loi Macron sont toutefois difficiles à cerner du fait des limites méthodologiques des études transmises.

Cependant, aucun élément présenté dans le cadre de ce bilan ne tend à indiquer que cette différenciation tarifaire aurait entraîné une pression concurrentielle accrue sur Booking.com.”

L’Autorité de la concurrence précise dans ses conclusions qu’elle restera particulièrement vigilante sur l’état de la concurrence dans ce secteur et n’exclut pas de s’auto-saisir si l’évolution concurrentielle du secteur le nécessite et si de nouvelles pratiques potentiellement anticoncurrentielles sont mises à jour.

Prospective européenne en marche sur ces sujets de concurrence  :

Sous l’égide de la Commission européenne, l’Autorité de la concurrence française ainsi que neuf autres autorités de concurrence européennes évaluent en ce moment les effets des différentes solutions mises en place dans les différents pays européens concernant la réservation hôtelière en ligne.

Ce groupe de travail a adressé des questionnaires aux différents acteurs du secteur, hôteliers, plateformes de réservation en ligne, « métamoteurs de recherche », etc., selon une méthodologie unifiée permettant ainsi une comparaison des différentes solutions.

Les conclusions de ce groupe de travail sont attendues dans les semaines qui viennent.

Elles permettront d’alimenter les analyses et les initiatives des autorités de concurrence au niveau national et communautaire dans ce secteur.

Dans ce contexte, les autorités du réseau européen de la concurrence ont engagé une réflexion commune, impliquant la Commission européenne et les chefs d’autorités nationales de concurrence, pour déterminer la meilleure approche pour ces sujets de concurrence.

Par ailleurs, l’Autorité a ouvert une enquête sectorielle dans le secteur de la publicité en ligne dans laquelle elle s’intéresse à certaines problématiques communes en matière d’algorithmes et de restitution des résultats.

Enfin l’Autorité veillera tout particulièrement à ce que les consommateurs puissent effectuer des choix éclairés et bénéficient d’une information loyale de la part des plateformes de réservation en ligne, ne faussant pas la concurrence entre les hôtels.


17/02/17

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